Mars 2020, le pays se confine.
Suzanne veut garder le contact avec ses copines et ses copains de Velpeau. « Je trouvais que les enfants n’avaient pas beaucoup la parole ». Son père, Jean, conseiller principal d’éducation dans le Loir-et-Cher, enseignant à l’Institut National Supérieur du Professorat et de l’Éducation de Fondettes et musicien est, lui aussi, coincé à domicile. « Avant, je ne rentrais pas avant 21 h. Là, j’avais plus de temps ». Il assure la partie technique.
Les premiers entretiens en distanciel sont enregistrés sur le téléphone ou l’ordinateur. « Pour les premières interviews de terrain, on avait bien un micro mais c’était pour faire sérieux, il n’était pas branché, rigole encore le papa. On s’est équipé depuis ».
Radio Velpo est née et son audience dépasse rapidement le cadre familial et amical. Les premières « pastilles » de 5 minutes deviennent des émissions de 20 minutes. « J’ai compris que Radio Velpo, c’est le podcast pas pour les idiots ! Je suis forcément concerné… du moins je l’espère », s’amuse l’ancien Président de la République, François Hollande, lorsqu’il répond à Suzanne en avril 2021. Car oui, la gamine est culottée. « On l’a sollicité par email, se rappelle le papa. Il était prêt à faire l’entretien directement mais Suzanne a eu un peu peur. Il nous a transmis l’enregistrement de ses réponses ».
Aujourd’hui Radio Velpo, c’est plus de 76 émissions, diffusées sur la plupart des sites de balladodiffusion (podcast), 400 000 téléchargements dans le monde entier… et une rediffusion sur Radio Campus Tours (99.5 FM) le mercredi de 9 h 30 à 10 h 30 et le samedi de 9 h à 10 h. De sa bande de copains, la « rédaction » s’est élargie à plus de 200 contributeurs de toute la France (pour participer envoyez vos sujets de 2 mn 30 maximum à radiovelpo@gmail.com). L’écolière prépare son avant-dernière année en élémentaire et ses parents la préservent autant qu’ils le peuvent.
« Nous avons refusé des sollicitations de grandes marques. Tout comme certaines télés pour éviter le phénomène de la bête de foire ! ». Le papa enchaîne : « on diffusera en septembre un reportage sur les coulisses du Musée des Beaux-Arts et des cinémas Studio car Suzanne connaît l’ancienne directrice de l’école maternelle des Abeilles, chargée de la programmation jeunesse. On va aussi inviter Laure Grandbesançon, qui anime “Les Odyssées” sur France Inter et Zep, l’auteur de Titeuf. »
France Inter, Suzanne est parvenue à en « pirater » les ondes pour y diffuser une chronique littéraire sur son album favori « Préférais-tu… » de John Burningham. Une lettre d’écolière glissée discrètement sous la porte de la journaliste Laetitia Gayet, une voisine du quartier… Et hop ! Le sujet enregistré à la maison est diffusé en octobre 2020.
Et toi Suzanne, que préférerais-tu faire plus tard ? « J’aimerais devenir écrivaine, maîtresse d’école ou journaliste. Plutôt à la radio, car à la télé, il faut s’habiller chic, sourire ou ne pas mettre les mains dans ses poches. J’enregistre mes émissions chez moi en pyjama ». Ton truc de journaliste ? « Les gens que j’interviewe, je les regarde dans les yeux sinon ils ont l’impression que je ne les écoute pas ». Et ta prochaine idée d’entretien ? « J’aimerais demander à Emmanuel Macron ce que ça fait d’être Président. J’ai encore plein d’idées, je parle de ce qui m’intéresse. Le jour où j’en ai marre, j’arrête ».
La parole est d’argent, le silence est d’or.